Le Service National Universel est un dispositif d’inspiration militaire mis en place en 2019 et porté par le président Macron comme une véritable ambition politique. Malgré l’échec de sa première application et le refus quasi unanime des organisations syndicales, des représentants de parents d’élèves et de la jeunesse, le gouvernement s’entête et lance des appels à projets dans les établissements pour cette rentrée 2023.
La note de service publiée le 23 juin 2023 (https://www.education.gouv.fr/bo/20...) sur la labellisation « classe engagée » et « lycée engagée » ne fait pas illusion, il s’agit toujours de la même volonté politique : utiliser l’école pour embrigader la jeunesse et mieux la contrôler. Le gouvernement persiste et s’entête dans sa volonté de généraliser le SNU. Le 19 septembre, Prisca Thévenot, secrétaire d’État à la jeunesse, affirme que le SNU peut :
Pourtant, la même Prisca Thévenot, déclarait le 4 août :
2 semaines de cours en moins pour les élèves de seconde au troisième trimestre.
Le nouveau dispositif s’adresse à des élèves de seconde générale et technologique et de première année de CAP, entre 15 et 17 ans. Les professeurs et équipe pédagogique proposent un projet global d’un an avec un séjour de cohésion de 12 jours sur le temps scolaire de mars à juin. Gabriel Attal a déclaré depuis que les séjours se feraient essentiellement en juin.
Les rectorats et la secrétaire d’Etat, Prisca Thévenot, n’hésitent pas à placer les équipes pédagogiques devant le fait accompli en tentant d’imposer la labellisation CLE (classes et lycées engagés). Or, que ce soit pour la « classe engagée » ou le « lycée engagé », la labellisation relève d’une décision de conseil d’administration. Le vote est obligatoire. En désignant les établissements « volontaires », au mépris de la procédure qui exige un vote du conseil d’administration, le gouvernement cherche à imposer ce dispositif aux équipes et aux établissements.Ajoutons à cela que l’accord des parents est obligatoire pour le séjour. Il faudra donc répartir les élèves non volontaires dans des classes déjà surchargées !!!
Au-delà du projet pédagogique qu’elle intègre, le dispositif modifie l’organisation des établissements. Les dernières instructions envoyées aux recteurs, le 6 octobre dernier, établissent précisément le calendrier des séjours de cohésion en Seconde, sur le temps scolaire, dans le cadre des CLE (Classes et lycées engagés) en 2024 : du 11 au 23 mars, 25 mars au 6 avril, 13 au 25 mai, du 3 au 14 juin et du 17 au 28 juin. Le gouvernement prévoit donc d’ajouter à la désorganisation du lycée Blanquer et au nouveau calendrier du bac 2024, l’absence d’élèves et de professeurs pendant 2 semaines.
Jamais n’est abordé dans ce long courrier (https://www.snes.edu/wp-content/plu...) la condition de nationalité alors que, sans modification du décret de 2020, le SNU reste interdit aux jeunes de nationalité étrangère. Le ministère promet un texte pour le début de l’année 2024 mais en l’état, toute la communication officielle qui présente le SNU comme ouvert à l’ensemble des jeunes âgés de 15 à 17 ans , est mensongère.
La baisse du nombre d’heures dédiées aux apprentissages et l’absence de professeurs ne semblent plus être un problème, tout cela pour répondre à une commande politique ! Quel cynisme ! dans une période de chasse aux heures « perdues » et de pression sur la formation continue.
SNU et Pacte
Le décret prévoit également un référent « engagement » désigné dans chaque établissement et rémunéré par le Pacte. Les missions du référent « engagement », rémunérées par le Pacte, recouvrent des tâches essentiellement administratives d’inscription, de vérification de l’état civil et de lien avec les familles. Les rectorats ont reçu l’information des « cibles » à atteindre il y a quelques semaines. Chaque académie doit afficher un nombre minimum de lycées engagés. De plus, les cours supprimés par le séjour de cohésion 2 semaines doivent être rattrapés dans le cadre du RCD, sous forme de visio ou de travail supplémentaire.
SNU et « classes engagées » : une vision autoritaire d’une éducation à la citoyenneté
Le gouvernement utilise des arguments des plus fallacieux pour imposer le SNU. Celui de la mixité sociale et de l’inclusion des jeunes en situation de handicap est inacceptable quand on connaît son rôle dans l’accroissement des inégalités sociales et le manque d’investissement pour l’accueil et l’accompagnement des élèves à besoins éducatifs particuliers.
La labellisation et la mise en avant de la notion d’engagement ne trompe personne. Le SNU porte une vision idéologique, passéiste et conservatrice de l’éducation à la citoyenneté. Il se nourrit du fantasme du service militaire, et présenté comme la solutions aux problèmes de laïcité, d’incivilité, de violences ….
Les personnels ne se reconnaissent pas dans cette vision, et refusent d’être le bras armé d’une telle politique. Nous continuerons à construire une culture commune démocratique basée sur l’exercice de l’esprit critique et l’émancipation.
Le décret indique les thématiques proposées pour les appels à projets (défense et mémoire, sport et Jeux olympiques et paralympiques, environnement, résilience et prévention des risques) ; et indique qu’ils peuvent s’appuyer sur des dispositifs déjà existants comme les classes de défense et de sécurité globale. Les équipes n’ont pas attendu le SNU pour construire des projets qui ont du sens, favoriser les connaissances et découvrir les formes d’engagement notamment à travers les labels E3D et égalité filles garçons.
Le dispositif ne masque en rien les véritables ambitions du SNU que l’on comprend avec le discours de président Macron, et dans le décret et la foire aux questions. Dans le décret, on constate : « Dans chaque académie, un référent académique « engagement » est identifié. Cette mission est conçue en cohérence avec celle du référent académique « mémoire et citoyenneté » et du référent académique « défense ».
Dans la foire aux questions , on peut lire que les séjours de cohésion sont consacrés notamment à la transmission des valeurs de la République, à la défense et à la mémoire, à la sécurité intérieure. Et que : « Les rituels républicains font partie intégrante des éléments qui rythment et donnent un cadre à chaque journée » ; « les élèves portent une tenue spécifique qui leur est fournie dès le premier jour du séjour. ».
Donc uniforme, salut au drapeau et autres cérémoniales militaires sont toujours d’actualité.
Le décret prévoit même de saisir le conseil supérieur des programmes pour faire en sorte que le programme de l’EMC soit articulé avec le SNU : « un projet pédagogique annuel proposant des contenus et initiatives s’inscrivant dans les actions éducatives et les enseignements quotidiens des lycées et, en tout premier lieu, de l’enseignement moral et civique et de l’éducation à la citoyenneté ».
Dans la foire aux questions, on peut lire : « De plus, l’engagement des jeunes donne lieu à une valorisation dans le cadre de la fiche orientation et dans leur parcours citoyen. » Le gouvernement souhaite donc forcer la main aux jeunes pour qu’ils participent au séjour de cohésion, plusieurs pistes avaient été évoquées comme attribuer des points bonus sur Parcoursup, comme si les éléments du tri social n’étaient pas déjà importants.
Refuser le SNU
Le dispositif « classe engagée » doit être obligatoirement soumis au vote du CA. D’ailleurs, ce pré-requis est indiqué dans la foire aux questions. Il faut informer les collègues et parents des dangers d’un tel dispositif. D’ailleurs les séjours de cohésion passés ont montré de nombreuses limites et problèmes organisationnels en termes de structures, d’installations inadaptées, de formation des personnels encadrants, parfois un danger pour la sécurité et la santé des élèves.
En l’état des textes réglementaires, rien ne garantit la participation des élèves étrangers à ce dispositif. En effet, la clause de nationalité comme pour la journée de défense et de citoyenneté est toujours d’actualité.
Nous devons refuser collectivement le SNU qui dénature notre métier et offre une vision dangereuse de l’éducation à la citoyenneté. Nous exigeons sa suppression et l’utilisation du budget alloué à des projets éducatifs qui ont du sens pour les élèves et personnels. Le Sénat estime la généralisation du SNU à 2 milliards d’euros alors que l’école manque de tout en cette rentrée de pénurie : NON au SNU !!!!